Ce jeudi 30 avril, la secrétaire d’Etat à la Culture Monika Grütters a créé la surprise en annonçant que l’Allemagne avait prévu de rendre au Nigeria les plaques de bronze du Bénin, issues des pillages lors de la période coloniale.
Après une réunion initiée par Monika Grütters, et réunissant des experts de musées, des responsables politiques nationaux et régionaux, la décision a finalement été convenue. Et «les premières restitutions sont prévues pour l’année 2022», a précisé la membre de la CDU (Union Chrétienne Démocrate).
Avec cette restitution, l’Allemagne souhaite «contribuer à la compréhension et à la réconciliation avec les descendants de ceux dont les trésors culturels ont été dérobés pendant la colonisation», a expliqué Monika Grütters dans un communiqué rapporté par l’AFP. D’ici au 15 juin prochain, les musées auront donc pour mission de publier une liste complète recensant l’ensemble des bronzes en leur possession. Par la suite, une nouvelle réunion sera organisée fin juin, afin d’organiser un calendrier des restitutions.

Jusqu’à présent, le Forum Humboldt est en possession d’environ 530 objets historiques dont plus de 400 bronzes provenant de l’Etat d’Edo. Il s’agit de la collection la plus importante du genre juste après celle du British Museum de Londres. Le 16 décembre 2020, la réouverture virtuelle du Forum sur la célèbre île aux Musées avait alors suscité une vive réaction de la part de l’ambassadeur du Nigeria en Allemagne, Yusuf Tuggar. À cette occasion, ce dernier avait lancé un appel à la restitution.
Un butin des expéditions punitives
Pour rappel, après l’invasion de l’empire britannique lors de «l’expédition punitive» du 18 février 1897, les soldats avaient saccagé la ville de Bénin, désormais appelé Bénin City, dans l’état d’Edo au Nigeria. Les trésors de l’Oba, l’ancien dirigeant du royaume, avaient été volés et emportés en guise de souvenir. Mais pour couvrir les frais de cette expédition, les britanniques avaient choisi de vendre leur butin sur les marchés de l’art de différents pays.
C’est pourquoi aujourd’hui, plus de 2.500 bronzes du Bénin se trouvent répartis aux quatre coins du monde dont certains seraient même perdus. Ces plaques de bustes et sculptures en laiton fabriquées entre le XVIème et le XVIIIème siècle, qui décoraient autrefois le palais du Royaume du Bénin, figurent désormais parmi les trésors les plus réputés de l’art africain.
Pour le chef de la diplomatie allemande, Heiko Maas, cette décision est «un tournant dans notre rapport à notre histoire coloniale», a-t-il indiqué dans un communiqué. Cette volonté fait d’ailleurs écho au programme d’échange et de formation «TheMuseumsLab» qui débutera ce mois-ci. Il s’agit d’une initiative qui a pour but «de mettre en avant l’apprentissage mutuel entre l’Afrique et l’Europe». Avec cet échange, l’Allemagne souhaite «faire avancer le travail de mémoire sur son histoire coloniale grâce à des échanges culturels».
QU’EN EST-IL DES AUTRES PAYS D’EUROPE ?
L’annonce de l’Allemagne fait suite au débat relancé l’année dernière (2020)concernant les trophées rapportés par les anciennes puissances coloniales d’Europe. Notamment du Royaume-Uni dont le British Museum détient de nombreuses oeuvres qui appartenaient autrefois au Royaume du Bénin, devenu depuis le sud-ouest du Nigeria.
Pour le moment, le British Museum n’entend pas céder, et a seulement accepté de «prêter» certaines oeuvres au Nigeria. Le pays d’Afrique de l’Ouest souhaite construire un nouveau musée dans lequel les précieuses plaques de bronze seraient exposées. Le projet, dont une partie des 3,4 millions d’euros est financée par le British Museum, devrait voir le jour en 2024 à Benin City (Etat d’Edo).

Pour sa part, la France a autorisé en décembre 2020 «la sortie des collections nationales et le transfert de propriété de plusieurs oeuvres». 26 d’entre elles sont des pièces pillées en 1892 par le Général Dodds, et elles devront être transférées au cours de cette année, à la République du Bénin.

D’après Le point, l’université d’Aberdeen, en Écosse va, elle aussi, rendre un « bronze du Bénin » pillé par les Britanniques en 1897. C’est « un bronze du Bénin », du nom de cette sculpture d’un buste noir, si symbolique, représentant un oba, c’est-à-dire un roi, qui va retrouver sa terre natale. Sa particularité ? C’est l‘une des centaines de pièces pillées par les Britanniques lors de la prise de l’ancienne ville d’Edo en 1897, alors capitale du royaume du Benin, aujourd’hui Benin City au Nigeria. Elle avait été acquise par l’université d’Aberdeen, en Écosse en 1957 lors d’une vente aux enchères. Cette dernière vient d’annoncer qu’elle allait la restituer à son pays d’origine, dans un contexte actuel de réflexion en Europe sur la restitution des trésors culturels aux ex-pays colonisés.

C’est un geste de repentance, car comme l’a déclaré le professeur George Boyne, président de l’université d’Aberdeen, « Il n’aurait pas été juste de conserver un objet d’une telle importance culturelle qui a été acquis dans des circonstances aussi répréhensibles. Nous avons donc décidé qu’un retour inconditionnel était la mesure la plus opportune ».
Quant à Lai Mohammed, ministre nigérian de l’Information et de la Culture, il a salué « un pas dans la bonne direction ». « D’autres détenteurs d’antiquités nigérianes devraient imiter cela », a-t-il ajouté dans le même communiqué.
C’est vraiment une bonne chose de renouer avec ce septième commandement de Dieu, « Tu ne voleras point » (Ex 20, 15)pour mettre fin à une telle spoliation transformée en droit de propriété! Ne faudra-t-il pas réparer financièrement aussi les préjudices historiques et culturels de ces peuples punis injustement?
By P.Protogène BUTERA
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