Jean Vanier, le fondateur des communautés de L’Arche accueillant à travers le monde des personnes avec une déficience intellectuelle, s’est éteint mardi 7 mai 2019, à 02h10, à l’âge de quatre-vingt dix ans. Affaibli par un cancer, il était hospitalisé depuis plusieurs semaines à la Maison médicale Jeanne Garnier à Paris.

Sa biographie
Fils d’un diplomate canadien, Jean Vanier nait le 10 septembre 1928 à Genève. À 13 ans, il s’engage au Collège de la Royal Navy à Dartmouth (UK) en pleine seconde guerre mondiale. En 1945, son père étant alors ambassadeur du Canada en France et sa mère déléguée de la Croix-Rouge, Jean participe à l’accueil des survivants des camps de concentration à Paris. Il en est profondément marqué.
Jean quitte la marine à 22 ans « pour suivre Jésus et œuvrer à la paix ». Après des années de formation en France et au Canada, il obtient en 1962 un doctorat en philosophie et devient enseignant. Mais en 1964, il découvre les conditions de vie sordides des personnes handicapées dans les asiles psychiatriques : « j’ai découvert un vaste monde de souffrance que j’ignorais absolument. J’avais été dans un monde d’efficacité dans la marine ou un monde intellectuel à travers les études. Et là j’étais devant un monde d’appel et cela m’a bouleversé. »

Une œuvre grandiose: Arche
En août 1964, il propose à deux hommes vivant en établissement, Raphaël et Philippe, de s’installer avec lui dans une petite maison de l’Oise, à Trosly-Breuil, qu’il baptise « L’Arche ». Ils y partagent une vie quotidienne simple, faite d’entraide et d’amitié. Très rapidement, cette vie fraternelle organisée autour des personnes fragiles fait de nombreux émules. Les « foyers » se multiplient en France et dans le monde : Canada en 1969, Inde en 1970, Côte d’Ivoire en 1974, Haïti en 1975, Australie en 1978… Sur les cinq continents, dans des contextes religieux et culturels très divers, cet art de « vivre ensemble » se répand largement.
Dès 1981, Jean Vanier ayant préparé sa relève, il se retire des responsabilités exécutives de L’Arche, tout en restant vivre dans sa première communauté de Trosly. Il se consacrait depuis lors à sa mission d’artisan de paix et de témoin de fraternité avec les plus humbles. Il recevait chez lui nombre de visiteurs du monde entier de toutes origines et de toutes conditions.

Conviction et action
Jean Vanier nous rappelle que la fragilité est intrinsèque à l’homme : la nier c’est s’empêcher d’être soi-même et mettre les plus vulnérables au ban de la société. Il souligne la nécessité de reconnaître sa propre vulnérabilité comme un don et une opportunité pour, d’une part, prendre conscience de nos capacités à progresser et devenir ainsi adulte, et d’autre part, pour accueillir l’autre en vérité, avec ses imperfections et ses vulnérabilités. Cet accueil de l’autre dans sa réalité humaine la plus profonde fait tomber les mécanismes de défense, réajuste les attentes, non idéalisées, les uns vis-à-vis des autres et permet de construire des relations de paix.

Accompagnants et accompagnés tissent des relations mutuelles qui vont au-delà de l’aide et du travail. Ensemble, les membres de L’Arche, qu’ils aient ou non une déficience intellectuelle, construisent leur vie communautaire : participation aux tâches, aux décisions, aux réflexions, aux fêtes et rassemblements, au souci les uns des autres. Chacun est invité à contribuer à la vie ensemble, selon ses aptitudes et ses désirs.
Il avait découvert une chose essentielle: Les personnes qui ont une déficience intellectuelle ont besoin de s’inscrire dans la société comme partenaires, et pas seulement comme objets de soin. Nos sociétés ont besoin que tous, y compris les plus faibles, s’engagent dans la construction d’un monde plus humain.
Foi et lumière pour l’avenir
Parallèlement, Jean Vanier fonde Foi et Lumière avec Marie-Hélène Matthieu, « des communautés de rencontres » qui se tissent autour des personnes, enfants ou adultes, ayant une déficience intellectuelle. Ces personnes accompagnées de leur famille et amis, sont invitées à participer à des rencontres mensuelles durant lesquelles sont partagés des temps d’amitié, de prière et de fête. Foi et Lumière compte près de 1500 communautés dans 81 pays des cinq continents.
Aujourd’hui, L’Arche est constituée de 154 communautés réparties sur les cinq continents, dont 35 en France qui sont reconnues comme établissements médico-sociaux. Elle compte 10 000 membres. De nouveaux projets sont chaque jour à l’œuvre pour répondre à l’appel des personnes ayant une déficience intellectuelle, si vulnérables et encore trop souvent méprisées, alors qu’elles ont une grande leçon d’humanité et d’amitié à nous offrir.
Sans doute que la mort du fondateur ne va pas couler l’Arche mais être plutôt une porte de l’espérance pour le rayonnement de cette spiritualité de l’Arche. Q »il se repose dans la paix du Christ!
Par Protogène BUTERA
Sources: http://www.jean-vanier.org
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